village de brussin

PAGODE ET BOUDDHAS DANS L'ALLIER ( Noyant d'Allier)

Noyant-d'Allier

A une vingtaine de kilomètres de Moulins (Allier), le village de Noyant abrite une pagode, témoin de l'exode des rapatriés d'Indochine vers ce village dépeuplé par la fermeture des mines. Avec la moitié de ses habitants d'origine eurasienne, Noyant est le témoin d'une intégration réussie.
Depuis 1982, un Bouddha s'alanguit devant les corons de Noyant.

Au milieu des tintements harmonieux des clochettes, face au bassin rempli de nénuphars, le Bouddha couché tourne le dos à l'alignement régulier des corons. Nous ne sommes pourtant ni en Extrême-Orient, ni dans un bassin minier du Nord de la France, mais à Noyant-d'Allier, au coeur du Bourbonnais.

C'est au XIXme siècle que les mines de charbon sont apparues dans les campagnes de l'Allier, entre Montluçon et Moulins. Mais en 1943, la fermeture de la mine de Noyant vide les corons. Au même moment, à des milliers de kilomètres de là, le drame indochinois commence. En 1954, après presque dix ans d'une guerre meurtrière, la France est battue à Dien-Biên-Phu. Les accords de Genève, l'année suivante, mettent fin à un siècle de domination française. Les Français d'Indochine doivent quitter le pays.

En plein hiver 1955, deux cents familles de rapatriés débarquent à Noyant-d'Allier pour occuper les corons vides. Vietnamiens, Cambodgiens ou Laotiens, métis pour la plupart, ils ont tout perdu, tout laissé derrière eux. L'installation n'est pas facile : maisons délabrées, pas d'eau courante, et l'hiver, cette saison inconnue. Heureusement, les Noyantais d'origine sont là. « Quand ils avaient besoin de quelque chose, on les aidait », se souvient l'un d'eux. Jusque dans les années 1960, des Indochinois viendront nombreux s'installer à Noyant. La moitié des habitants est eurasienne.

Tous les mercredis, les Noyantais se retrouvent autour de l'épicier venu proposer ses produits exotiques. Ces familles redonnent vie au village. On comptera ainsi jusqu'à dix-sept classes dans l'école communale ! Les rapatriés deviennent artisans ou commerçants. Mais la plupart s'en vont chercher du travail dans les grandes villes françaises. « Quand j'étais petite fille, mon père travaillait à Paris et revenait tous les week-end », se souvient Mme X aujourd'hui commerçante à Noyant.

Aujourd'hui, la moitié des 930 habitants du village est d'origine eurasienne. Symbole de cette culture indochinoise solidement implantée : la pagode construite en 1982. Un bonze, rétribué par l'association bouddhique de Noyant, y officie toute l'année. Deux à trois cents personnes se retrouvent trois fois par an pour les fêtes du Têt, de la Naissance de Bouddha et de la Compassion.
Les enfants des rapatriés habitent aujourd'hui à Paris, à Lyon ou dans l'est de la France. Ils reviennent pour les vacances, comme Cathy qui habite la Moselle et revient à Noël et pour les grandes vacances. Une façon pour elle de se ressourcer. En juillet-août, la population du village passe ainsi à 2 000 personnes !
Le village reste un point d'ancrage pour toute la communauté indochinoise.

(Texte de Nicolas SENÈZE)

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